9.30.2007

Art premier (où l'auteur, toujours chauvin, prêche de bonne foi pour sa paroisse)

Désireux de tuer le temps, j'ai saisi l'opportunité qui se présentait à moi hier de sillonner en compagnie de photographes quelques expositions officieuses du septembre de la photo qui se tient actuellement dans les Alpes Maritimes, le "sept off", comme disent ceux qui en sont. Quelle ne fut pas ma surprise d'entendre toute la journée ces différents artistes, exposés ou non, discuter quasi-exclusivement entre eux de technique : usage du sténopé, vertus controversées du numérique, procédés de développement alternatifs et artisanaux, contact, lampe U.V., questions de format, j'en passe... Bref, toutes discussions oiseuses de "gens du métier" dont certains aspects m'échappaient un peu, s'il faut tout avouer. Seule une éminence maçonnique du coin eut l'heur d'élever le débat par diverses considérations esthétiques ou éthiques bienvenues qui n'eurent pour effet visible que de le rendre hermétique pour une partie de son auditoire, ce dont je ne pus que me réjouir bassement. Mais toutes ces arguties laborieuses m'ont avant tout permis de prendre une fois encore la mesure du fossé qui sépare la littérature de toute autre forme artistique. Notons qu'il est des gens pour dénier à la photographie ce statut d'art à part entière. Peu importe, là n'est pas le sujet! Tout art classique estampillé d'un label officiel ferait aussi bien l'affaire.

Le fait est que la littérature est la seule activité créatrice à pouvoir échapper totalement au joug de la technique, à être parfaitement libre de toute contrainte de ce genre. Tous les arts y sont soumis, à des dégrés divers, depuis la sculpture jusqu'à l'architecture en passant par la musique. Tous requierent une certaine qualité de médium, voire quantité de matériels, pour pouvoir s'exprimer. La littérature? Elle n'a que faire des traitements de texte, et même si peu d'encre et de papier! Serait-elle seulement orale qu'elle survivrait tout de même. Moins bien, certes, mais avec toujours la même force de pénétration. Et ce parce que le seul matériau qu'elle nécessite est la parole, le Verbe, dont tous peuvent profiter. Son unique fondement, son véhicule attitré, c'est l'acte même qui a fait de l'homme ce qu'il est, puisque au commencement, le Verbe était. Elle est aussi, par conséquent, l'art le plus pur, et sans doute le plus sacré, plus sacré même que la musique! Car la glaise dans laquelle est taillé le premier roman de gare venu est potentiellement la même dont furent pétris les livres saints auxquels l'humanité a suspendu toute sa foi.

En ce sens, qui possède les mots possède le pouvoir, indéniablement. Mais s'il est le plus indépendant et le plus puissant des moyens donnés à l'homme de s'exprimer, l'art littéraire n'en est pas pour autant le plus évident, bien au contraire. Certes il est le plus détaché de toute contingence, mais pour cette raison même, il est aussi le plus lourd, le plus encombrant pour le créateur qui choisit d'en faire sa voie. Car l'outil et la technique sont de précieux appuis, et toute restriction dictée par la contingence peut être une forme confortable dans laquelle un artiste rusé aura plaisir à se glisser pour mieux y prendre assise et s'en jouer. Béquille ô combien secourable, dont celui qui ne s'appuie que sur la plume se trouve tout à fait privé! On ne triche pas avec les mots, et la liberté complète qu'ils laissent, pour grisante qu'elle semble, peut être un piège amer tendu à celui qui prétend s'en servir, puisqu'il s'agit de l'art le plus difficile à faire se mouvoir, celui qui prend vie avec le plus de lenteur, celui pour tout dire dont l'inertie accablante n'est proportionnelle qu'à l'inconcevable densité : en bref, le secret le plus rétif à toute agitation humaine. Oui, on n'a jamais d'avantages sans contre-parties, et une liberté si grande entraîne son lot de responsabilités. De fait, quel auteur n'a pas ressenti au moins une fois cette angoisse pétrifiante face aux "espaces infinis" où seul peut se déployer le Verbe? Celui-là n'est qu'un imbécile, un irrécupérable philistin qui n'a rien compris à ce qu'il manie, un pauvre joueur inconscient des forces insoupçonnables qui gisent inanimées entre ses mains. Avis à cette engeance : le seul support sur lequel reposent le Mythos et le Logos, c'est un désert glouton, qu'il importe de savoir féconder.

6 commentaires:

albin, journalier a dit…

à bientôt...

Ague a dit…

Chaleureuse invitation à passer voir - et plus si affinités - mon petit forum (http://renaissance.forumactif.com/index.forum) que je tâche de relancer après l'avoir négligé notamment au profit de mon blog (www.europepuissance.blogspot.com).Cordialement. :D

Et si l'Anarque veut passez poster un com de temps en temps sur mon blog, ce serait avec plaisir. ^

A+

vieux-cul a dit…

ha hec hique est uhihe à ha hihéhahure,hour hoi qui hé ha he hangue hè has fahihe....

traduction:
la technique est utile à la littérature, pour moi qui n'ai pas de langue c'est pas facile...

Captainpascal a dit…

Ben alors gros fainéant ? Tu branle plus rien depuis septembre et pendant ce temps là Angot sort un nouveau livre ! T'as pas honte ?

TheNightWatch a dit…

Putain oui, j'ai honte, Capitaine! Mais quand je vois ce que nous pond la vilaine Angot ou tant de ses consoeurs, j'ai presque envie de me claquemurer dans un silence de consternation...

Bon, ok, non, c'est vraiment de la flemme. N'empêche qu'il y aurait beaucoup à dire sur le chapitre de la féminisation de la "littérature" (au sens premier d'ensemble des gens de lettre) française et occidentale de manière générale. De quoi passer une bonne fois pour toutes pour un irrécupérable macho. Faudrait que je m'y mette, donc...

Quand j'aurai un accès plus régulier à internet, dont je suis pas mal coupé ces temps-ci, je fais mon comebaque tonitruant. Juré craché.

Merci à toi pour cet aimable coup de pied au cul! (ainsi qu'aux autres pour leurs encouragements)

A bientôt!

Anonyme a dit…

Comebaque, please! :=)

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