6.21.2007

Cannes, festival du sparadrap (où l'auteur tire sans doute des conclusions hâtives)

J'habite Cannes, la plus célèbre - hélas! - petite cité de pêcheurs de l'univers répertorié. Un endroit du globe où le recours salutaire aux forêts est une nécessité absolue en période de festival. Et Dieu sait que pour une ville d'à peine 70 000 âmes (en comptant les damnées), on a un lot plus que roboratif de festivals! Ces jours-ci, c'est le FIP, festival international de la publicité, qui fait déferler sur nos pavés tranquilles une nuée internationale de publicitaires, journalistes et autres parasites jet-setteurs. Mais pourquoi diable vous parlé-je de cette anecdotique sauterie pour yuppies?

Eh bien ce midi, alors que je sortais à peine de mon lieu de travail pour aller me sustenter, je me retrouvai à la caisse du Monoprix local, mon soda à 90 centimes à la main, juste derrière un grand con d'Américain bon teint, 30 à 35 ans, son kit piéton high tech directement greffé à l'oreille, et affublé de son inévitable accréditation festivalière pendouillant au bout d'un cordon bleu sur ses pectoraux surdéveloppés. Profitant des quelques secondes d'attente obligatoire m'étant allouées avant que je puisse sortir sous le lourd soleil de ce premier jour d'été déguster ma boisson fraîche, je zieutais, de façon totalement anodine, l'ensemble des articles de ce cuistre que la caissière, avec l'ineffable lassitude qui caractérise ce métier, passait à son scanner (beep!), lorsqu'un détail incongru attira mon attention : voilà un homme seul qui, entre autres choses, achetait cinq ou six paires de bas noirs d'une célèbre marque. Cinq ou six paires. Ce n'était pas comme si sa compagne avait eu urgemment besoin qu'il lui en achète une, pour dépanner, à la veille de la clôture des festivités... Laquelle compagne, de toute façon, devait être gentiment restée au bercail à New-York, Springfield, Houston, ou Trifouillis-the-gooses.

Légèrement amusé, je fis par curiosité le détail de ses courses : de nombreuses paires de bas, donc, mais aussi :

- Une grosse paire de ciseaux (pourquoi pas)
- Un petit couteau de cuisine (?)
- Un rouleau de sparadrap blanc (ok)
- Deux rouleaux de large ruban adhésif noir (?!)
- Trois petits pots de glace Ben & Jerry (nostalgie du Homeland, I guess)

Le tout pour un total de 95 euros et des poussières, réglés en MasterCard de luxe. "L'hôtesse de caisse" (haha) enfournait tout ça dans des sacs plastiques sans se presser, mais surtout sans avoir l'air de se rendre compte de la cocasserie de ces achats. J'ai déjà fait ce sale boulot, je sais ce que c'est : on pourrait vous donner à encaisser un phoque mort en nuisette, du moment qu'il y a un code barre à scanner, vous ne calculez plus rien. Dont acte. Pour ma part, je ne pouvais réprimer un petit sourire moqueur. La pensée qui provoqua en moi une si soudaine jovialité? "Je crois que notre amateur de bondage s'est trouvé une partenaire de jeu pour la soirée!" Traitez-moi de paranoïaque ou d'esprit mal tourné si ça vous chante, mais c'est aussi ça, Cannes.


Have a nice evening, buddy!

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